Préma: Usine à champions
S’il est admis que les deux équipes française ART et DAMS sont depuis longtemps parmi les meilleures équipes de formule de promotion avec une multitude de titres en F3000, GP2, F2, GP3, F3, l’équipe italienne PREMA, s’est hissé au même niveau voir plus haut sur les 10 dernières années. Véritable usine à champions, sa progression mérite d’être racontée au moment où l’équipe s’apprête à fêter ses 40 ans d’existence.
La famille Rosin, à l’origine du projet
L’équipe Prema, créé en 1983 par Giorgio Piccolo (qui a quitté l’équipe au bout de 10 ans) et Angelo Rosin, s’est longtemps contenté d’aligner des monoplaces en F3 Italienne avec notamment les titres de Roberto Colciago (1990), Donny Crevels (1998) et Peter Sundberg (1999). Passé en Formule Renault 2.0 au début des années 2000, Préma est champion à trois reprises grâce à un partenariat avec Toyota pour former ses jeunes pilotes. (2001 : Ryan Briscoe, 2003 : Frank Perera, 2005 : Kamui Kobayashi).
En 2003, l’argent du partenariat avec Toyota, permet à Préma de monter en parallèle de la Formule Renault, un projet à dimension européenne avec une équipe de trois pilotes dans le nouveau championnat F3 Euroseries. Coup d’essai, coup de maitre car Ryan Briscoe remporte le titre devant Christian Klien et Olivier Pla. Parmi les pilotes alignés par Prema cette année-là, on retrouve un certain Robert Kubica ainsi que Lucas di Grassi qui participe à quelques courses en début de saison.
Hélas, l’année suivante c’est la douche froide. Seul Frank Perera réussit quelques résultats avec 4 podiums. Redoublant dans l’équipe, le Français réussit à améliorer ses performances en 2005 en finissant 4eme derrière Lewis Hamilton, Adrian Sutil et Lucas di Grassi, mais sans parvenir à arracher une victoire.
Baisse de régime
En 2006, en parallèle de la F3 Euroseries, Prema s’attaque à la Formule Renault 3.5, très renommée à l’époque. La première année est convenable avec une victoire de Montanari. Mais c’est surtout en 2007 que l’équipe montre les dents avec Ben Hanley qui dispute le titre à Alvaro Parente jusqu’au bout. Finalement vice-champion avec deux victoires, Prema ne peut masquer par ce beau résultat une baisse de forme de son équipe de Formule 3 dont aucun des pilotes n’est parvenu à terminer dans le top 10.
En 2008, les résultats de l’équipe dans les deux championnats sont du même ordre avec la quatrième place de Molina en Formule Renault 3.5 et celle de Van der Zande en Euroseries.
L’année 2009 est catastrophique pour Prema avec très peu de résultats. L’équipe se recentre alors uniquement sur la F3 Euroseries d’autant que ce championnat vient de baisser brusquement de niveau avec la création du GP3, championnat concurrent direct.
Avec le passage de 10 à 6 équipes, cette année de reconstruction facilite la tâche de Roberto Merhi qui fait gagner à nouveau Préma. C’est le premier titre de l’équipe de Vénétie Italienne depuis 2003.
Domination
Le championnat d’Euroseries reprend des couleurs en même temps que Prema et la série redevient un championnat très disputé avec 12 équipes en 2013. L’équipe Italienne va alors aligner les titres avec : Juncadella en 2012, Marciello en 2013, Ocon en 2014, Rosenqvist en 2015 et Stroll en 2016. On remarque que parmi ces cinq pilotes seul Esteban Ocon était un débutant l’année de son titre.
Après tant de succès, Préma, qui domine son sujet en Formule 3, décide de monter en GP2. L’affaire est bien préparée avec l’embauche de personnels compétents venant des équipes de pointe de la discipline. Pour les pilotes, et à la surprise générale, c’est Pierre Gasly, sixième du championnat précédent avec DAMS qui rejoint l’équipe. A ses côtés, on retrouve Giovinazzi vice-champion F3 l’an passée.
La prise de risque sera payante pour le pilote Français qui, après un début de championnat poussif, va monter en puissance et remporter le titre devant son équipier Italien. C’est un exploit pour Préma qui réalise un doublé pour sa première année en GP2 et le complète en réalisant aussi un autre doublé en F3 Euro avec Stroll et Gunther. Difficile de faire mieux.
Tout en gardant les mêmes règlements et la même voiture, la FIA décide de rebaptiser le GP2 en Formule 2 afin de revenir à une classification des formules de promotion lisible à l’image des années 80. Cela ne changera rien au niveau de Prema qui remporte le premier titre de F2 en 2017 avec le débutant Charles Leclerc. En Euroseries, c’est moins bien avec la première défaite depuis cinq ans face à Lando Norris et Carlin. Gunther, premier pilote Préma n’est que 3ème.
S’installer au sommet
Pour 2019, le défi est important. Prema, ultra dominateur en Euroseries (7 titres sur les 8 dernières années) va se confronter directement à ART ultra dominateur en GP3 (5 titres sur les 9 dernières années, dont les 4 derniers). L’équipe française part même avec l’avantage du calendrier et du format des week-ends. En effet, le règlement du nouveau championnat de F3 est basé sur celui de GP3.
Néanmoins, c’est un carton plein pour Prema qui classe ses trois pilotes aux trois premières places du championnat avec le titre pour Shwartzman devant Armstrong et Daruvala. En revanche, c’est la catastrophe en F2 où les résultats sont décevants avec ni Schumacher ni Gelael dans le top 10 du championnat.
L’année suivante, Prema corrige le tir en réussissant l’exploit de gagner les deux championnats F3 (Piastri) et F2 (Schumacher). Dans les deux cas, ce ne fut pas une domination, car les deux champions eurent beaucoup de mal : Piastri gagnant avec 3 points d’avance sur Pourchaire (ART), alors que Schumacher termina avec seulement 14 points d’avance sur Ilott (Virtuosi) après un championnat de 24 courses. 2021 va permettre de faire encore mieux avec le débutant Oscar Piastri, qui après une entame prudente, va dominer le championnat de F2 (60,5 points d’avance) et le Norvégien Denis Hauger qui va survoler celui de F3 (26 points d’avance). Une nouvelle fois, les deux titres tombent dans l’escarcelle de Prema et cette fois, sans contestation possible.
Il fallait un point d’arrêt à cette domination, et Prema va être à son tour victime de la fuite de ses cerveaux. MP Motorsport, qui jusque-là n’était qu’une équipe de milieu de tableau, va soudainement dominer le championnat de F2 2022 grâce à Drugovich mais aussi grâce à l’intégration d’ingénieurs venant de chez Prema. En parallèle, les performances des pilotes Prema vont être décevantes avec Daruvala 7eme malgré sa grande expérience et Hauger 10eme.
En Formule 3, il n’est plus question de domination et malgré quelques belles performances, les pilotes Prema vont être battus pour le titre par Martins avec Art (Bearman 3eme et Leclerc 6eme). L’engagement à partir de 2022 de Prema en endurance (LMP2) peut aussi expliquer cette baisse de régime temporaire. Cependant, l’équipe Italienne a des ressources et cette année ses pilotes de F2 et de F3 se battent pour les deux titres. S’il est plus que probable que le titre F3 revienne à Bortoletto sur Trident, le titre F2 pourrait revenir dans l’équipe grâce à Frederic Vesti.
Reconnu par le monde de la F1
Sur les 28 pilotes ayant disputé pour l’équipe des saisons en F3 et/ou en F2 de 2014 à 2021, 11 ont couru par la suite en Formule 1 soit 39% (en orange dans le tableau ci-dessous). Cette statistique pourrait encore augmenter car il est normal que les pilotes de 2022 ou 2023 ne soient pas encore arrivée en F1.
Au cours des 12 dernières années, Prema a gagné 4 titres de F2 (en 7 tentatives) et 10 titres en F3 ce qui est considérable. L’équipe Italienne a su trouver le bon équilibre entre le choix de pilotes performants et les budgets associés. La réussite entrainant souvent la réussite, les meilleurs pilotes font tout pour entrer dans cette équipe qui se présente elle-même comme la troisième force du sport automobile Italien derrière Ferrari et Alpha Tauri.
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