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Retour sur la carrière de Frédéric Vasseur

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Retour sur la carrière de Frédéric Vasseur
Julien Peres

Le manager français, jusqu’alors Team Principal d’Alfa Romeo Sauber a été officialisé par la Scuderia Ferrari dès 2023. Alors que la vénérable institution de Maranello sort d’une saison frustrante, mais porteuse d’espoirs, nous revenons ici sur la carrière de l’ingénieur Francilien, l’un des plus grands découvreurs de talents des 30 dernières années, qui accède à l’un des postes les plus prestigieux, et difficiles, du paddock.

Frédéric Vasseur est diplômé de l’ESTACA en 1996. Avant même la fin de sa scolarité, dès 1990, il rejoint l’écurie ASM et œuvre en tant que bras droit du fondateur de l’équipe, Didier Panissier. L’écurie fait alors rouler Franck Lagorce en championnat de France de Formule Renault. Ce dernier remportera le titre cette année-là. Les chemins de Panissier et de Vasseur se séparent en 1996, le premier fondera ASM Racecars qui s’engagera en Rallye-Raid alors que le second reprend les rênes de la structure de circuit, qui commence à s’aligner en championnat de France de Formule 3, l’échelon supérieur de la Formule Renault. A une époque où boucler les budgets commence à devenir un sujet pour les équipes de monoplace, Frédéric Vasseur a pour credo d’offrir sa chance aux pilotes talentueux, par exemple Sébastien Philippe, lâché par la FFSA malgré un gros palmarès en karting, de 1996 à 1998. Dès la saison 1998, la méthode Vasseur commence à porter ses fruits : le belge David Saelens remporte le titre national de Formule 3 ainsi que les prestigieux Masters de Zandvoort.

Les années 2000 sont fastes. Remarquée pour son professionnalisme, ASM devient le bras armé de Renault Sport en Championnat de France de Formule 3. Celui-ci est alors l’un des plus compétitifs du monde et de nombreux pilotes issus des 4 coins du globe viennent tenter de se mettre en évidence à Magny-Cours, Nogaro, Lédenon ou encore Le Mans.

La lutte fait alors rage entre les 3 équipes de référence que sont ASM, Saulnier Racing et Signature (aujourd’hui Signatech), toutes équipées de Dallara 399 motorisée par le bloc 2 litres atmosphérique Renault-Sodemo. ASM décroche le titre de vice-champion de France des pilotes en 2001 grâce à Tiago Monteiro avant de remporter un second titre l’année suivante par l’intermédiaire de Tristan Gommendy qui s’impose également au prestigieux Grand Prix de Macao. Dans le même temps, ASM participe aux Championnats de France et d’Europe de Formule Renault 2.0, alignant notamment Alexandre Prémat et Simon Pagenaud.

Frédéric Vasseur en 2001 aux côtés de ses pilotes chez ASM, Tristan Gommendy à gauche et Tiago Monteiro à droite – Source Dominique Pérès

Le Championnat de France de Formule 3 fusionne alors avec son homologue allemand dès la saison 2003 pour former la F3 Euro Series. ASM tourne le dos à Renault et devient le bras armé de Mercedes dans ce nouveau championnat. L’association ne tarde pas à fonctionner et ASM remporte pas moins de 6 titres pilotes consécutifs de 2004 à 2009 grâce à Jamie Green, Lewis Hamilton, Paul di Resta, Romain Grosjean, Nico Hulkenberg et enfin Jules Bianchi. Passent également entre les mains formatrices de Vasseur ces années-là Adrian Sutil, Sebastian Vettel, Giedo van der Garde, Kamui Kobayashi, Esteban Gutiérrez ou encore Valtteri Bottas.

Vasseur sera titré en GP2 avec Rosberg, Hamilton, Hulkenberg et Vandoorne.

Véritable entrepreneur, Frédéric Vasseur cofonde également, avec Nicolas Todt, la structure ART Grand Prix pour participer au nouveau championnat de GP2 Series dès 2005. Le succès est immédiat avec d’emblée le titre pour la première saison grâce à Nico Rosberg, renouvelé en 2006 par Lewis Hamilton. ART Grand Prix et ASM fusionnent en 2008. Les succès de cette équipe demeurent encore aujourd’hui, en Formule 2, Formule 3 ou encore en FRECA, bien que Frédéric Vasseur ait laissé les rênes à Sébastien Philippe, l’un de ses anciens pilotes, au moment d’entamer son aventure en Formule 1. Si l’on se penche sur la grille de départ de la saison à venir de Formule 1, ce n’est pas moins de 8 pilotes sur les 20 qui ont pris part à au moins une saison de monoplace au sein d’ART Grand Prix. La passion pour le développement des jeunes pilotes demeure une passion pour Vasseur qui, bien que très occupé par ses activités en Formule 1 ces dernières années, continue d’arpenter régulièrement les pistes de karting pour repérer les talents de demain.

Toujours animé par son désir d’entreprendre, Frédéric Vasseur s’implique également dans la genèse de la compétition automobile électrique en créant Spark Racing Technology. La structure, basée dans l’Essonne est fournisseur exclusive des châssis de Formule E depuis la première saison et, depuis 2019, des buggys alignés dans le Championnat Extreme E.

Spark, créé par Vasseur fourni les châssis de Formula E. Ici deux anciens pilotes de passés par ART GP: Vandoorne et Di Grassi.

Les compétences du manager français, aussi bien en matière d’entreprenariat que de détection des talents et de gestion d’une équipe de course tapent une première fois dans l’œil des décisionnaires de Renault à la fin de la saison 2009. L’écurie d’Enstone sort d’une saison catastrophique sur le plan sportif et également du point de vue de l’image de marque. Le management est empêtré dans la gestion du crashgate, Fernando Alonso, sur qui la performance reposait, claque la porte de l’écurie pour rejoindre Ferrari et les sponsors, dont ING, alors sponsor titre, fuient ce naufrage. Approché pour succéder au sulfureux Flavio Briatore, Frédéric Vasseur décline l’offre, préférant alors concentrer son attention sur ART GP. Eric Boullier héritera du poste, non sans une certaine réussite.

Mais le brillant manager français, fort de ses succès en formules de promotion, ne pouvait pas ne pas tenter sa chance un jour dans la catégorie reine. Une nouvelle opportunité se présente fin 2015, à nouveau à Enstone sous les couleurs de Renault F1. Le constructeur français effectue son retour en catégorie reine. Les pilotes, sont Kevin Magnussen et Jolyon Palmer, ce dernier n’est pas désiré et est hérité de la période Lotus F1, précédente identité de l’équipe. Vasseur co-dirige Renault Sport F1 avec son compatriote Cyril Abiteboul. Le bilan sportif de l’année est mitigé et Vasseur ne se retrouve pas dans le fait de devoir co-diriger l’équipe. Il claque la porte d’Enstone à la fin de la saison, non sans avoir contribué à attirer Nico Hülkenberg, l’un de ses anciens poulains chez ART GP pour la saison suivante.

Bien que l’aventure ait tourné court, la méthode Vasseur semble avoir convaincu le paddock. Une nouvelle opportunité se présente à la mi-saison 2017. Le manager français remplace Monisha Kaltenborn à la tête de Sauber. La vénérable équipe suisse sort de 2 saisons catastrophiques sur le plan sportif et le nouveau propriétaire, Longbow Finance, un fond d’investissement suédois, fait confiance à Vasseur pour redresser la structure. Outre l’aspect sportif, plusieurs chantiers sont sur la table : renouer des liens privilégiés avec Ferrari, gérer l’arrivée d’Alfa Roméo comme nouvelle identité de l’écurie ou encore former Charles Leclerc, rookie ultra-prometteur qui vient d’enchainer les titres en GP3 puis en Formule 2 mais qui découvre la Formule 1. Vasseur va passer les 5 années suivantes à la tête de l’écurie d’Hinwil, dirigeant notamment Leclerc, Giovinazzi, Räikkönen ou encore Bottas et Zhou cette année. Les résultats sportifs ne seront pas toujours au rendez-vous, avec notamment des saisons 2020 et 2021 très mitigées, néanmoins, Vasseur réussit à apporter stabilité et à moderniser les installations de l’écurie. L’arrivée d’Audi en tant que nouveau propriétaire, en sous-main dès l’an prochain puis officiellement à partir de 2026 couronnant la bonne gestion de la structure suisse.

C’est fort de toutes ces expériences que Frédéric Vasseur prendra l’an prochain la tête de la Scuderia Ferrari, la plus prestigieuse écurie de la grille. Il y retrouvera le diamant brut Charles Leclerc, qu’il a contribué à polir en 2018 chez Alfa Roméo Sauber ainsi que le besogneux, et politique, Carlos Sainz. La tâche s’annonce ardue pour Vasseur. Ces dernières années, les ingénieurs de Maranello ont parfois pu produire de très bonnes monoplaces (2017, 2018, 2022) mais ont rencontré des difficultés à assurer le développement de manière à les maintenir compétitive sur la durée de la saison. De même, les stratèges et ingénieurs de course se sont montrés fébriles, c’est peu dire, ces dernières saisons et tout particulièrement cette année. La poigne de Vasseur sera nécessaire – mais sera-t ’elle suffisante ? – pour faire bouger les lignes au sein de la Scuderia. Il devra également composer avec la pression des tifosis et de la presse italienne, Gazzetta dello sport en tête. Son prédécesseur Jean Todt a mis 4 ans à mettre en œuvre sa méthode avant que Ferrari ne retrouve les chemins du succès, en 1999. De fait, le temps long demeure le meilleur outil pour pérenniser les méthodes qui mènent au succès. A l’heure de Netflix et de l’instantanéité des réseaux sociaux, le comité directeur de Ferrari devra le comprendre afin de laisser à Vasseur le temps d’adapter sa méthode à la Scuderia.

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